mercredi 9 mai 2018


Jusqu’à Vézelay : le chemin de Saint-Jacques
Voyez sur ce thème la revue alluMeuse de ce mois de juin...

L’un de ses itinéraires du grand pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle traverse notre région. Namur se situe en effet à la jonction de la Via mosana, qui vient d’Aix-la-Chapelle et de la Via monastica, sentier qui mène à Vezelay (GR 654). De Namur à Saint-Jacques par la voie historique de Vézelay et Saint-Jean-Pied-de-Port, le tracé est long de 2.600 km. Certains quittent cependant la basilique Sainte-Marie-Madeleine de Vézelay pour prendre la direction du Puy en Velay, Arles et Saint-Gilles du Gard, également buts de pèlerinage : je ferai comme eux, puisque ce dernier tronçon passe à Alès.



L’origine de cette longue marche en deux mots ? Saint Jacques entreprit au Ier siècle l’évangélisation de la péninsule ibérique. Décapité à son retour en Palestine, il aurait été transporté en secret aux lieux de sa prédication, recevant une sépulture en Galice. On perdit la trace du tombeau, jusqu’à ce que l’ermite Pelayo voie une pluie d’étoiles tomber sur une colline où il se trouvait, donnant ainsi naissance au culte de saint Jacques…

Namur a toujours été une étape importante du Saint Jacques pour les pèlerins venant du Nord (Flandre et Hollande) et de l’Est (Allemagne) par la Via mosana, ce que rappelle l’itinéraire balisé de coquilles en bronze tracé dans la ville. L’église Saint-Jacques, qui date de 1757, occupe un site qui abritait un hospice d’accueil des pèlerins, situé à l’extérieur de la troisième enceinte. Le beffroi, également appelé tour Saint-Jacques et daté de 1388, est l’un des 56 beffrois de Belgique et de France classés au patrimoine mondial de l’UNESCO. Le pied reliquaire de saint Jacques, qui fait partie du trésor d’Hugo d’Oignies, et la statue du saint par le Maître de Waha sont exposés au Musée des Arts Anciens du Namurois, rue de Fer.




 

Du côté belge, la « Voie de Vézelay » suit en partie le GR 125 (« Tour de l’Entre-Sambre-et-Meuse ») et le GR 126 (de Bruxelles à Membre-sur-Semois). Le chemin est physique, escaladant les coteaux de la Meuse, Bois-de-Villers et Rivière sur la rive gauche, Godinne, Évrehailles et Leffe sur la rive droite. A Dinant, il faut un peu chercher pour trouver les traces l’ancien pèlerinage : il y a la rue Saint-Jacques, bien  sûr, avec au n° 114 une statuette rappelant l’église dédiée au saint ; au n° 123 de la rue Grande, s’élevait un hôpital doté d’une chapelle où les pèlerins faisaient étape. L’église Saint-Lambert de Bouvignes garde dans le mur du chœur le souvenir d’un pèlerin assidu du XVIIe siècle. Sur une pierre gravée, on peut en effet lire : LAMBERT MELAV / LEQVELLE AT / FAICT PAR TROY / FOIS LE VOYAIE / MS R St IACQZ 1677.
La « voie de Vézelay » serpente ensuite dans la haute vallée mosane, avec ses falaises de calcaire, ses crêtes boisées et ses prairies verdoyantes. L’abbaye de Hastière-par-delà, avec sa superbe abbatiale romane, avait son refuge ; le pèlerin moderne ne manquera pas non plus les hauts lieux que sont le château et les jardins de Freyr ou Soulme, un des plus beaux villages de Wallonie.  Le pèlerin s’éloigne de la Meuse pour longer l’Hermeton jusque Soulme, puis Vodelée. Une bonne heure de marche mène alors Doische. Petite incursion en France – la cité médiévale de Hierges – puis en route pour le pays de Toine Culot, où l’on suit les méandres du Viroin que l’on traverse à Vierves. A partir d’Olloy, on remonte dans les bois vers Oignies et la frontière est franchie, cette fois pour de bon, à Moulin-Manteau.

 
Côté français, le GR 654 remonte la Meuse dans une mosaïque naturelle découpée de grandes parcelles boisées, vestiges de l’antique forêt d’Ardenne. Le chemin de Saint Jacques traverse donc du nord au sud le département des Ardennes. Il passe d’abord à Rocroi, réputé pour sa fortification en forme d'étoile et lieu chargé d'histoire depuis la bataille qui a opposé le 19 mai 1643 Français et Espagnols. Après le plateau de Rocroi vient la Thiérache, avec le lac des Vieilles-Forges, puis Signy-l’Abbaye, bourg de traditions, où une abbaye de l’ordre de Cîteaux a été fondée en 1135 sous la direction de saint Bernard de Clairvaux. Dernière étape ardennaise, Château-Porcien, car au-delà, c’est la Marne et Reims, la Champagne crayeuse qui cédera le pas à la Champagne humide…

Pèlerins malgré eux
 

Le pèlerinage a pris très tôt un caractère pénitentiel : dès le VIe siècle en Occident, ce voyage pieux fut imposé pour expier des fautes. Réservé d’abord aux péchés les plus graves des religieux, il sanctionna bientôt les fautes plus légères et s’étendit aux laïcs, selon une véritable tarification dont usaient les confesseurs : les destinations ne manquèrent jamais et il se trouvait toujours quelque lieu saint établi à une distance proportionnée à la gravité du péché. Dans certaines régions, le pèlerinage déborda du cercle religieux pour devenir une peine afflictive imposée par les tribunaux laïcs pour des délits de droit commun. Le pèlerinage judiciaire devint ainsi l’ordinaire des tribunaux urbains des Pays-Bas, de l’Allemagne et de la Suisse ; cette pratique, peu connue dans les régions françaises, était très courante à Namur, où elle subsista jusqu’au XVIe siècle. Ils partaient en groupe, deux fois par an. Les condamnés devaient aller plus ou moins loin selon la gravité du délit, et rapporter à leurs juges la preuve de l’accomplissement du pèlerinage. La peine de mort guettait d’ailleurs les tricheurs…



2 commentaires:

  1. Bon pèlerinage! Nous prierons pour toi demain lors de nos visites aux monastères des Météores...
    Françoise et Jean Pol

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